MOGADOR: Le Sable du Temps

Vent aidant, le Sable du Temps passe sur MOGADOR, aujourd'hui ESSAOUIRA. En novembre, le vent s'apaise, c'est la saison des pluies tant espérées par les petits paysans à l'intérieur du pays. Chaque averse, souvent nocturne, est une bénédiction. On sort l'araire comme aux temps bibliques, on y atèle un âne et un boeuf, on perpétue l'art du sillon millénaire, un sillon où on sème l'orge, le pois, la fève tandis que la saison des grenades -"romann" en arabe- bat son plein. On retrouve ces beaux fruits sur les petits étals de la médina d'ESSAOUIRA avec tout ce qu'il faut d'autre pour faire un délicieux repas simple et frugal. Sur la grande plage, on se baigne plus timidement qu'en été tandis qu'à la jetée, les pêcheurs lancent patiemment leur ligne en quête d'un "burri" -un mulet- voire un petit loup, ou parfois une dorade qui perd sa lucidité l'espace d'une seconde. Une seconde fatale. Toute l'année, les barques bleues, plus rarement jaunes, continuent leur ballet en quête d'un poisson plus rare et souvent moins noble. La sardine reste la reine sans rivale, mais quel que soit le "poiscaille", l'excitation des goélands est la même, ça piaille dans le ciel au-dessus du port, du matin au soir. Entre la plage et le port, nous ne manquons pas de saluer le chalet "Chez Jeannot", Jeannot qui suit fidèlement nos SENTIERS NOMADES avec Agnès depuis l'Île de Ré. Bonheur de partager ce beau voyage avec tous ceux qui ont aimé ce cher pays. À ESSAOUIRA, on peut s'appeler Abderraman, Youssef ou Brahim et prier face à La Mecque en portant Simon sur son tablier. On peut aussi être haut comme 3 pommes et porter sur son maillot un numéro 10 promis à la célébrité, car j'en suis persuadé, le MAROC gagnera le trophée suprême du ballon rond dans les 2 prochaines décennies, en tous cas il le mérite, il faut juste laisser le temps à ce petit bonhomme de devenir... pommier. Au MAROC, le téléphone portable fait reculer le tabou de la photo. Le selfie devient ici aussi un art accessible et populaire mais il faut toujours photographier l'autre avec respect et consentement. Respect, c'est le guide incontournable, toujours et partout. Au petit cimetière chrétien d'ESSAOUIRA, une stèle: ""CHRISTIAN RICHARD, Peintre - Traducteur, 21 Octobre 1940 - 12 Janvier 2001. Tu nous manques tellement"" Et si c'était tout simplement cela l'aboutissement d'une vie? Un mot doux sur une stèle du cimetière de MOGADOR, un mot perdu entre les vents d'hiver, sous les Sables du Temps qui rongent les sépultures et les souvenirs. Une pensée tendre, la lueur inespérée d'un ultime talisman... La nuit tombe encore une fois sur les remparts de l'ancienne Cité Portugaise, l'ocre devient jaune et se brouille sur le mystère de la vie, les calèches emmènent leurs équipages vers des sommeils peuplés de joies simples. Sommeils bercés de petits riens, de minimes espérances... Jusqu'au matin. Jusqu'au nouveau jour... Demain, la pluie nous conduira vers un grand souk à une vingtaine de kilomètres à l'intérieur des terres. Souk pluvieux, souk heureux. Amitiés, bises et beaux SENTIERS NOMADES.